Le leader de l'opposition tchadienne et ancien Premier ministre, Succès Masra, en détention depuis plus d'un mois, a annoncé mardi dans une lettre adressée à ses partisans qu'il entamait une grève de la faim.

« À partir de ce soir, en solidarité avec vous tous et en protestation contre des injustices imméritées, je vais commencer une grève de la faim », peut-on lire dans la lettre rendue publique par des membres du parti de Masra, Les Transformateurs.

« Cela fait 40 jours que je suis ici, cherchant encore, sans doute comme vous, la raison de ma présence en ce lieu », a écrit Masra, qui s'était présenté sans succès à l'élection présidentielle de l'année dernière.

Arrêté le 16 mai, il fait face à des poursuites pour « incitation à la haine, révolte, formation et complicité avec des gangs armés, complicité de meurtre, incendie criminel et profanation de tombes ».

« Détention arbitraire »

Le 19 juin, ses avocats ont déposé une demande de mise en liberté provisoire, qui a été rejetée par les autorités judiciaires.

Francis Kadjilembaye, coordinateur de l'équipe juridique de Masra, a déclaré à l'AFP que le groupe d'avocats considère que Masra est en « détention arbitraire ».

L'un de ses avocats français, Vincent Brengarth, basé à Paris, a affirmé à l'AFP : « Il est urgent que cette détention prenne fin ainsi que cette procédure injustifiée. »

Le 14 mai, quarante-deux personnes, principalement des femmes et des enfants selon la justice tchadienne, ont été tuées à Mandakao, dans la région du Logone Occidental (sud-ouest du Tchad), avec Masra accusé d'avoir provoqué ce massacre.

Mandat d'arrêt international

La justice a mis en avant un message audio de 2023 pour incriminer Masra, qui, selon une traduction française de l'original en langue ngambaye, déclare : « Apprenons à utiliser une arme à feu. Que ce soit fille ou garçon, homme ou femme... soyons tous des boucliers protecteurs. »

Les avocats de Masra affirment que cette déclaration, faite « dans un contexte spécifique, a fait l'objet d'un mandat d'arrêt international » émis contre leur client, mais ils précisent que celui-ci a été « levé le 2 novembre 2023, suite à un abandon des poursuites ».

Originaire du sud du Tchad, Masra appartient au groupe ethnique ngambaye et jouit d'une grande popularité parmi les populations majoritairement chrétiennes et animistes du sud, qui se sentent marginalisées par le régime largement musulman de la capitale N'Djamena.