Comment redresser les comptes publics ? À défaut de résoudre l'équation immédiatement, François Bayrou a voulu de nouveau alerter les Français sur le "piège" de la dette qui menace "la survie de notre pays" et promis des réponses d'ici au 14 juillet en écartant déjà la piste d'augmentation des impôts.
Le Premier ministre s’est exprimé à l'issue d'une réunion qui a rassemblé plusieurs membres de son gouvernement avec des parlementaires, des représentants d'organismes de sécurité sociale ou encore des représentants syndicaux.
Graphiques à l'appui, chiffres et courbes en guise de preuves, François Bayrou a énuméré les faiblesses de la France qui "manque de moyens" pour financer ses priorités parce "qu'elle ne produit pas assez et ne travaille pas assez" par rapport à ses voisins.
Résultat, la dette s’aggrave - 3.305,3 milliards d'euros en 2024, soit 113% du PIB ce qui devient "un piège dangereux, potentiellement irréversible", selon le Premier ministre.

L’étude du budget arrive lundi soir à l’Assemblée nationale. Dans une interview au Journal du Dimanche, le Premier ministre français n’exclut pas l’utilisation du 49.3 si les débats sont bloqués.
La spirale de la dette française
"Nous ne pourrons pas en supporter durablement la charge" qui pourrait "atteindre 100 milliards d'euros en 2029", a-t-il prévenu. "Si les taux d'intérêt explosent, alors c'est l'explosion assurée" à laquelle aucun gouvernement ne résistera, a-t-il insisté, un leitmotiv de longue date chez lui.
Puis son exposé a défini les grandes lignes d’un budget 2026 qui donnera 3 milliards de plus à la Défense, mais avec aussi des coupes budgétaires ailleurs, puisque le ministre de l'Economie Eric Lombard avait évoqué, dimanche, "un effort" de 40 milliards pour réduire le déficit de 5,4% du PIB —objectif 2025— à 4,6% en 2026.
Pour le reste il faudra attendre. Ce sera avant l’été si tout va bien, en amont des débats budgétaires qui commenceront en octobre comme de coutume devant le Parlement.
Sur quels leviers le gouvernement veut agir ? Les ministres ont fait fuiter quelques pistes. "L'effort doit être équitable entre les trois grandes catégories" -Etat, sécurité sociale et collectivités locales, a précisé M. Lombard. La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a notamment évoqué une action contre "la très grande dérive" des arrêts maladie.
Enfin, si le gouvernement parle d’économies, il ne parle pas de nouvelles recettes, François Bayrou a exclu "d'augmenter les prélèvements" car c'est "intenable".
Opération de communication
Cette réunion pour appeler les Français à une prise de conscience et à un sursaut n’a pas attiré tout le monde. L’association des maires de France a boycotté l’événement le qualifiant d’«opération de communication».
Pire, la gauche et l’extrême droite menacent à nouveau de dégainer l'arme de la censure.
"La conférence de presse du Premier ministre n’est pas à la hauteur de la grave crise des finances publiques", a réagi Marine Le Pen, prévenant que le Rassemblement national "ne laissera pas passer des mesures contre les Français alors qu'il existe tant de gabegies".
La gauche s'inquiète, elle, de "l'impact récessif" sur la croissance de nouvelles économies et appelle le gouvernement à envisager des hausses d'impôts pour les plus riches et des remises en cause d'exonérations aux entreprises.

Quelques jours après avoir abaissé la note de l'ensemble du pays, Moody's a abaissé la note de sept grandes banques françaises alors que la dette publique explose et l’instabilité politique perdure.
Invité à la réunion en tant que président de la commission des Finances de l'Assemblée, Eric Coquerel (gauche radicale) a eu "l'impression d'être figurant d'une opération de communication".
Même vocabulaire chez la leader du syndicat CGT, Sophie Binet, pour qui le Premier ministre n'a apporté "aucune réponse" à ses "interrogations" et "interpellations". De son côté, la patronne de la CFDT, premier syndicat français, Marylise Léon, a déploré "une vision comptable" du gouvernement, estimant qu'“on ne fait pas un budget uniquement avec un tableur Excel”.
Bref, la question se pose. Ce gouvernement tiendra-t-il jusqu'à la présentation du budget 2026 car si on fait les calculs, il n’a toujours pas de majorité absolue à l’Assemblée nationale.