Des centaines de personnes se sont rassemblées vendredi dans une région rurale du Liberia pour les funérailles d'État de l'ancien président Samuel Doe, 35 ans après son assassinat, dans le cadre des efforts continus du pays pour se réconcilier avec son passé violent.
Il est commémoré dans son domaine familial dans le comté de Grand Gedeh, au sud-est du pays, aux côtés de son épouse Nancy, décédée en mai et qui sera enterrée sur le domaine.
Les Libériens se sont rassemblés le long du parcours vendredi alors que les cercueils du couple - celui de Doe symbolique, et celui de son épouse contenant son corps - étaient lentement transportés à travers la capitale du comté, Zwedru, sur le plateau d'un camion décoré de guirlandes aux couleurs rouge, blanche et bleue du pays.
Drapeaux en berne
La cérémonie d'État se déroule en présence du président Joseph Boakai, qui a déclaré une période de deuil cette semaine, du mardi au vendredi, avec les drapeaux mis en berne.
La page Facebook de son bureau exécutif a indiqué que ces commémorations s'inscrivent dans un « effort plus large » visant à « promouvoir la réconciliation nationale ».
Les circonstances entourant la mort de Doe marquent un épisode tristement célèbre de l'histoire du Liberia.
Doe a été capturé à Monrovia le 9 septembre 1990 par le chef de guerre Prince Johnson, acteur clé des guerres civiles (1989 à 2003).
Ce dernier est apparu dans une vidéo regardant ses combattants mutiler et torturer lentement Doe à mort, tout en sirotant calmement une bière.
Les images de la torture avaient abondamment circulé dans la sous-région ouest africaine durant les années 90, notamment sous forme de CD/DVD.
Diverses rumeurs mais peu d'informations concrètes existent quant au sort et à l'emplacement des restes de Doe après cette mort cruelle.
L'ascension de Doe au pouvoir était également marquée par la violence.
Dictature brutale
Son règne de 1980 à 1990 reste controversé, rappelé par de nombreux Libériens comme une dictature brutale, tandis que d'autres se souviennent avec nostalgie de certaines mesures transformatrices qu'il a mises en œuvre.
La Libérienne Mercy Janjay Seeyougar a confié à l'AFP à Monrovia, avant les funérailles, qu'elle se souvenait de la fois où Doe lui avait donné un bonbon, et que lors des nettoyages de rue, il « s'arrêtait pour être avec les gens qui faisaient le nettoyage ».
En 1980, Doe, alors sergent de l'armée dans la vingtaine, a mené un coup d'État en assassinant le président William Tolbert, dernier d'une lignée de dirigeants issus de la classe dirigeante américano-libérienne composée des descendants d'anciens esclaves américains.
Établissant rapidement un régime de terreur, Doe a fait exécuter publiquement 13 membres du gouvernement qu'il avait renversé sur une plage, et son régime a ensuite emprisonné ou persécuté de nombreux opposants.
Il a été élu lors d'une élection présidentielle en 1985 que de nombreux observateurs ont qualifiée de frauduleuse.
La brutalité de son régime, combinée à la détérioration des conditions économiques et au favoritisme envers le groupe ethnique Krahn dont il était membre, a conduit à une impopularité croissante.