AMÉRIQUE DU NORD
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Du Guatemala à l’Irak : les changements de régime provoqués par les États-Unis dans le monde
Le président Trump a évoqué un changement de régime en Iran. Mais ce type d’intervention a toujours des répercussions imprévues comme l’instabilité politique, les violences ethniques et les conflits sectaires.
Du Guatemala à l’Irak : les changements de régime provoqués par les États-Unis dans le monde
Le président Bush prononce un discours devant l'équipage à bord du porte-avions USS Abraham Lincoln le 1er mai 2003. / Reuters
23 juin 2025

Le président américain Donald Trump a évoqué un changement de régime en Iran, après que des avions américains ont largué des bombes anti-bunker sur les principaux sites nucléaires de Téhéran ce week-end.

La position de Trump contraste fortement avec les déclarations du vice-président J.D. Vance et du secrétaire à la Défense Pete Hegseth, qui ont affirmé que Washington n'avait pas l'intention de renverser le gouvernement iranien.

"Il n'est pas politiquement correct d'utiliser l'expression "changement de régime", mais si le régime iranien actuel est incapable de rendre à l'Iran sa grandeur, pourquoi n'y aurait-il pas de changement de régime ? MIGA !!!", a écrit Trump sur ses réseaux sociaux, établissant un parallèle avec son mouvement MAGA.

Cette prise de position marque un revirement, alors que Trump s’était engagé, lors de sa campagne, à ne pas entraîner les États-Unis dans de nouvelles guerres étrangères. Ce virage a contrarié le camp isolationniste du Parti républicain, qui souhaite maintenir l'armée américaine à l'écart de toute guerre menée au nom d'un autre pays dans un pays lointain.

Par le passé, les États-Unis ont procédé à des changements de régime dans de nombreux pays, qui ont généralement eu des effets inattendus, tels que l'instabilité politique, les violences ethniques et les conflits sectaires.

Voici une brève liste des changements de régime soutenus par les États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale qui ont conduit à une guerre civile prolongée ou qui ont renforcé des groupes hostiles aux intérêts américains.

Iran – 1953

Avec le soutien du Royaume-Uni, les États-Unis ont joué un rôle majeur dans le renversement du gouvernement démocratiquement élu du Premier ministre de l'époque, Mohammad Mossadegh, en 1953.

Les États-Unis ont installé une monarchie pro-occidentale sous la direction du Shah Mohammad Reza Pahlavi, principalement pour protéger les intérêts pétroliers occidentaux et contrer l'influence soviétique en Iran.

Le coup d'État orchestré par la CIA a été marqué par la corruption, la propagande et la violence populaire. Bien que les États-Unis aient réussi à remplacer Mossadegh par le Shah, le coup d'État a alimenté un ressentiment durable envers les États-Unis parmi les Iraniens.

Le Shah a dirigé l'Iran d'une main de fer jusqu'en 1979, date à laquelle la révolution islamique menée par le chef religieux, Ruhollah Khomeini, a renversé la monarchie et établi un gouvernement résolument anti-américain.

Le coup d'État de 1953 est largement cité comme un catalyseur du sentiment anti-américain au Moyen-Orient.

Guatemala – 1954

En 1954, les États-Unis ont orchestré la destitution du président démocratiquement élu Jacobo Arbenz, perçu comme une menace communiste en raison de ses réformes agraires qui dérangeaient les intérêts commerciaux américains.

La CIA a eu recours à la guerre psychologique, à la propagande et à une force mercenaire dirigée par l'officier Carlos Castillo Armas pour renverser le gouvernement.

Bien que le coup d'État ait réussi à court terme et qu'Armas ait pris le pouvoir avec le soutien des États-Unis, l'intervention secrète a déclenché plus de trois décennies de guerre civile (1960-1996), faisant environ 200 000 morts et engendrant de nombreuses violations des droits humains.

Au lieu de placer le pays dans la sphère d'influence américaine, l'instabilité politique a renforcé les groupes de gauche et attisé le sentiment anti-américain en Amérique latine.

Cuba – 1961

En 1961, les États-Unis ont tenté de remplacer le gouvernement communiste de Fidel Castro par un régime pro-américain, orchestrant une "invasion" d’exilés cubains formés par la CIA.

Cette prétendue invasion échoua en quelques jours, les forces cubaines infligeant une défaite décisive aux exilés. Castro en sort renforcé, consolidant son pouvoir et se rapprochant de l'Union soviétique.

Ce coup d'État manqué mena à la crise des missiles de Cuba de 1962, période où le monde fut au bord d'une guerre nucléaire à grande échelle, en pleine Guerre froide.

Sud-Vietnam – 1963

En 1963, les États-Unis ont planifié et exécuté le renversement du président Ngo Dinh Diem, dont la politique était censée compromettre les efforts de Washington pour contrer le communisme dans le pays.

Avec l’aide de la CIA et du soutien financier de l’ambassade américaine, les généraux sud-vietnamiens ont renversé et assassiné leur président. Le coup d'État a créé un vide politique, affaiblissant le gouvernement sud-vietnamien, tout en renforçant l'insurrection du Viet Cong.

L'instabilité a ouvert la voie à une escalade de l'intervention militaire américaine, qui a fait plus de 58 000 morts américains et des millions de victimes vietnamiennes.

À l'instar des coups d'État en Iran et au Guatemala, le changement de régime soutenu par les États-Unis a déstabilisé le Sud-Vietnam et compromis les intérêts américains à long terme dans la région.

Irak – 1963

Les États-Unis ont activement soutenu le coup d'État du parti Baas en 1963 contre le Premier ministre de l'époque, Abd al-Karim Qasim, pro-communiste et réticent à rejoindre la République arabe unie, alliée aux États-Unis.

Washington a joué un rôle essentiel dans le coup d'État de 1963, qualifié d'"une des opérations de la CIA les plus élaborées de l'histoire du Moyen-Orient".

Qasim a été tué et le parti Baas a brièvement pris le pouvoir. Mais le second régime baasiste sous Saddam Hussein (1979-2003) a fait de l'Irak un adversaire des États-Unis et a entraîné guerres, répression et instabilité régionale.

Afghanistan – 1979-1989

Dans les années 1980, les États-Unis ont financé et armé des moudjahidines afghans pour renverser le gouvernement communiste installé par les Soviétiques et contrer l'influence du Kremlin pendant la Guerre froide.

La CIA a secrètement acheminé des milliards de dollars d'aide, d'armes et de formation, ce qui a conduit au retrait soviétique d'Afghanistan en 1989.

Cependant, l'intervention américaine a déclenché une guerre civile (1989-1996) en Afghanistan, contribuant à la prise de pouvoir des talibans. Parallèlement, Al-Qaïda a pris pied dans la région, ce qui a conduit à l'invasion américaine de 2001 et à l'effondrement de l'ordre civil qui a suivi pendant les deux décennies suivantes.

Irak – 2003

Les États-Unis ont envahi l'Irak en 2003 pour renverser le régime de Saddam Hussein, prétextant la présence d’armes de destruction massive (ADM). Ils ont entrepris de remplacer le régime de Saddam par une démocratie dite pro-occidentale.

Bien que Washington ait réussi à renverser le régime en un rien de temps, aucune ADM n'a été trouvée. L'invasion a déclenché une insurrection, la violence sectaire s'étant emparée du pays et des groupes armés ayant lancé des attaques contre les troupes américaines.

Pendant ce temps, des groupes terroristes comme Daech ont établi leur présence dans des zones de non-droit du pays, déstabilisant toute la région.

Plus de 4 400 soldats américains et plusieurs centaines de milliers de civils irakiens ont été tués, laissant l'Irak instable pendant des années.


SOURCE:TRT français et agences
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