Le nouveau chef du gouvernement français, Sébastien Lecornu, a annoncé, samedi, qu'il allait revenir sur la suppression de deux jours fériés prévue par son prédécesseur pour réduire le déficit budgétaire du pays, et a tendu la main à la gauche, au lendemain de la dégradation de la note de la dette française.
L'agence américaine Fitch a abaissé vendredi soir la note de la France de AA- à A+, prenant acte de l'instabilité gouvernementale et des incertitudes sur les politiques budgétaires.
Dans son communiqué, elle a estimé que "cette instabilité (affaiblissait) la capacité du système politique à mettre en œuvre une consolidation budgétaire d'ampleur", jugeant improbable de ramener le déficit public sous 3% du PIB en 2029 comme l'ambitionnait le gouvernement sortant.
"J'ai décidé de retirer la suppression de deux jours fériés", a déclaré le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, dans un entretien à la presse quotidienne régionale mis en ligne samedi.
Écartant un nouveau conclave sur les retraites, M. Lecornu a également assuré miser sur "le dialogue avec les partenaires sociaux" pour trouver "d'autres sources de financement" du budget 2026, qui a fait tomber les deux gouvernements précédents, ceux de Michel Barnier puis de François Bayrou.
Taxe et hauts patrimoines
Interrogé sur l'éventuelle mise en place d'une taxe sur les très hauts patrimoines dite "Zucman" (du nom de l'économiste Gabriel Zucman, ndlr), comme le demande la gauche, le Premier ministre s'est dit prêt à travailler sur des "questions de justice fiscale", tout en appelant à faire "attention au patrimoine professionnel, car c'est ce qui permet de créer des emplois et de la croissance en France".
Côté patronat, Patrick Martin, président du Medef, première organisation patronale du pays, a prévenu samedi qu'une "grande mobilisation patronale" sous la forme d'un "meeting" serait organisée si les impôts des entreprises étaient augmentés dans le cadre du budget 2026.
Pour sortir de l'impasse budgétaire, M. Lecornu, nommé mardi, a annoncé qu'il comptait mener une "discussion parlementaire moderne et franche, de très bon niveau" avec les socialistes, les Ecologistes et le Parti communiste, les appelant à "s'émanciper" de La France insoumise (LFI, gauche radicale).
Le contre-budget proposé par les socialistes avant la nomination de Sébastien Lecornu prévoyait un effort budgétaire de 22 milliards pour l'année prochaine, contre 44 milliards pour le plan proposé par François Bayrou.
"Vingt milliards c'est quand même beaucoup pour les gens à qui on les prend !", a cinglé le fondateur de LFI Jean-Luc Mélenchon lors d'un meeting en fin d'après-midi à la Fête de l'Humanité, grand raout annuel de la gauche en France. LFI accuse les socialistes de se compromettre avec le camp du président Emmanuel Macron.
Sébastien Lecornu a évoqué également de possibles discussions avec le Rassemblement national (RN, extrême droite), écartant toutefois "un accord politique".
Quelque 200.000 personnes ont participé mercredi à une journée de manifestations en France contre la rigueur budgétaire annoncée par François Bayrou pour réduire la dette qui dépasse les 3.300 milliards d'euros, soit presque 114% du PIB.
Une nouvelle journée de protestation, cette fois à l'appel des syndicats, est prévue jeudi.
Les deux principaux syndicats, CGT et CFDT, ont salué le recul sur la suppression des jours fériés comme "une première victoire" ou une "première bonne nouvelle". Ils l'ont toutefois jugé insuffisant et ont rappelé attendre notamment la suspension de l'impopulaire réforme des retraites, passée aux forceps en 2023 malgré une vaste mobilisation dans la rue.
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