AFRIQUE
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La CEDEAO a 50 ans, quel bilan ?
Il y a exactement 50 ans, le 28 mai 1975, quinze pays ouest-africains s'accordent pour établir la CEDEAO, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest. Bilan avec deux spécialistes africains sur cette coopération régionale.
La CEDEAO a 50 ans, quel bilan ?
Bola Tinubu, président du Nigeria, dirige actuellement la Cedeao (Autres) / TRT Afrika Français
29 mai 2025

La Cédéao, dont le siège est à Abuja, la capitale du Nigeria, a été fondée dans un contexte marqué par deux dynamiques majeures : la volonté de dépasser les divisions coloniales et la nécessité d’une intégration économique face à la fragilité des jeunes États ouest-africains.

Le Traité de Lagos, l’acte fondateur de la CEDEAO, signé par quinze pays il y a 50 ans, compte désormais  douze membres : cinq pays francophones (Bénin, Côte d'Ivoire, Guinée, Sénégal et Togo), cinq anglophones (Gambie, Ghana, Liberia, Nigeria et Sierra Leone) et deux lusophones (Cap-Vert et Guinée-Bissau). 

Récemment, en janvier 2024, le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont quitté la CEDEAO, l'accusant d’avoir imposé à leur encontre des sanctions “inhumaines, illégales et illégitimes” après les coups d’Etat. Ces trois pays sont désormais unis dans une confédération, l’Alliance des États du Sahel (AES). 

Cinq décennies plus tard, l’heure est au bilan. Mountaga Diagne, politologue sénégalais et enseignant-chercheur à l'université Gaston Berger (UGB) de Saint Louis a souligné, dans un entretien à TRT Français, le rôle novateur de cette création régionale : “C’était une idée révolutionnaire, quinze ans après les indépendances de lancer une coopération régionale”, rappelle-t-il. 

Mountaga Diagne a indiqué que l’organisation régionale a permis de renforcer les échanges économiques entre les pays africains. L’axe commercial Abidjan-Cotonou-Accra en est une illustration mais l’échec de la mise en place d’une monnaie unique envisagée en 2020 (Eco) est souvent cité comme un exemple de celui de l’institution.

Trois pays du Sahel claquent la porte de la CÉDÉAO

La Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) réunie dimanche à Abuja, a entériné le départ du Burkina Faso, du Mali et du Niger fin janvier 2025. Un délai de rétractation de six mois leur laisse la possibilité de changer d’avis.

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Gilles Yabi, fondateur béninois du think tank Wathi dresse un bilan de la CEDEAO dans une interview sur la chaîne béninoise Canal 3. Selon lui, “la CEDEAO est un projet d’intégration qui a 50 ans, avec des échecs et des victoires mais il ne faut pas oublier des acquis importants comme la liberté de circulation entre les pays membres, la mise en interconnexion des réseaux électriques.”

Les défis 

Si la libre circulation des personnes et l'intégration économique semblent être un succès, la CEDEAO fait face également à des défis : les tensions politiques et les barrières culturelles. Pour Gilles Yabi, “les échecs de l'institution et les limites de l’organisation résident dans la mise en œuvre des décisions communautaires par les Etats membres. Certaines décisions ne sont tout simplement pas appliquées”.

Depuis 1993, la CEDEAO s’engage, comme le stipulent ses statuts, à régler les conflits régionaux et travailler à la paix. Ainsi, en juin 2004, les chefs d'état-major ouest-africains ont approuvé la création d'une force de 6.500 hommes, dont un contingent d'intervention rapide de 1.500 soldats en cas de troubles. En novembre 2005, un programme de formation de cinq ans est adopté pour permettre des opérations de maintien de la paix. Le groupe de supervision du cessez-le-feu de la CEDEAO, l’Ecomog, a compté jusqu’à 20 000 hommes et est intervenu, par exemple, au Libéria et en Côte d’Ivoire.

La CEDEAO compte sur le soutien de la Turquie pour relever les défis sécuritaires - TRT Afrika

Ces dernières années, la Turquie et de nombreux pays africains ont renforcé leurs liens militaires, économiques et culturels.

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Le rêve encore lointain d’une monnaie commune

Mountaga Diagne rappelle les interventions militaires importantes au Liberia et en Gambie qui ont permis d’assurer la stabilité régionale, tout en reconnaissant que la crise récente avec les pays du Sahel a généré une “crise de légitimité”.

Pour surmonter les défis, Mountaga Diagne propose une réforme de la gouvernance, qui, selon lui, “doit être inclusive, le parlement de la CEDEAO pourrait être élu par exemple”. Il suggère également d’inclure dans l’organisation les citoyens pour trouver une nouvelle dynamique. 

L’un des plus grands reproches faits à la CEDEAO reste l’absence de monnaie unique. L’Eco, annoncé pour 2020, puis reporté à 2027, bute sur des divergences économiques entre pays membres. Pourtant, les avantages seraient immenses : fin des coûts de change car actuellement, les transactions passent souvent par le dollar ou l’Euro, renforcement des échanges intra-régionaux et stabilité monétaire face aux fluctuations des devises nationales.

SOURCE:TRT français et agences
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