FRANCE
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Depuis son rachat par l’extrême droite, soupçons de racisme et licenciements à l’ESJ Paris
Depuis son rachat fin 2024 par un groupe d’investisseurs incluant Bolloré, Arnault et Saadé, l’École supérieure de journalisme de Paris connaît une série de licenciements et de sanctions ciblant notamment du personnel et étudiants "racisés".
Depuis son rachat par l’extrême droite, soupçons de racisme et licenciements à l’ESJ Paris
L'ESJ Paris reprise par des propriétaires conservateurs de médias / AFP
23 juillet 2025

Selon une enquête de StreetPress, plusieurs membres du personnel et étudiants, en majorité “racisés”, affirment avoir été écartés ou sanctionnés sans motif clair, dans un climat de tensions croissantes.

Licenciements suspects

Selon le site d’investigation spécialisé sur l'extrême droite, Bakary Camara et son frère, agents d’entretien en poste depuis 2016, ont été convoqués en juin pour un licenciement économique. 

Les deux hommes, d’origine mauritanienne, affirment ne jamais avoir reçu la prime qui leur avait été promise pour retirer des affiches anti-Bolloré placardées en février. 

Une ancienne responsable de l’école, Elhame Medjahed, les aurait alors indemnisés personnellement. Cette dernière, directrice pédagogique depuis 2022, a elle-même été évincée fin mai après une mise à pied.

Selon plusieurs enseignants, son licenciement serait intervenu après un mail de recadrage,  comportant des allusions à son engagement syndical passé, signé du nouveau directeur Emmanuel Ostian et envoyé en copie à plusieurs membres de la nouvelle direction. 

Aucune annonce officielle n’a été faite à propos de cette responsable dont le profil a été discrètement retiré du site internet de l’école début juillet.

Depuis la reprise de l’école, la direction a été remaniée : Emmanuel Ostian (ancien de LCI) a été nommé directeur, aux côtés de figures proches des milieux conservateurs comme Alexandre Pesey ou Édouard du Peloux. 

Ce dernier dirige également l’Institut libre de journalisme qui forme des journalistes pour les médias de droite et d’extrême droite.

Plusieurs autres membres du personnel ont quitté l’établissement ou ne sont plus visibles dans les locaux : la responsable des conférences, le responsable technique, la responsable administrative ou encore la professeure d’anglais, dont le contrat à durée déterminée n’a pas été renouvelé à la fin de l’année scolaire. 

La direction évoque un changement d’organisation, tout en assurant que certains salariés sont toujours dans les effectifs.

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“Clan d’Arabes”

Au printemps 2025, douze élèves de l’école, dont neuf racisés, ont été convoqués dans les jours suivant les conseils de classe. Deux d’entre eux ont été temporairement exclus.

Emmanuel Ostian affirme avoir simplement ciblé les étudiants ayant les plus grandes difficultés, évoquant parfois l’absence de baccalauréat. 

Cependant, plusieurs enseignants et étudiants jugent la méthode inappropriée et affirment que d’autres élèves, également en difficulté mais non convoqués, n’ont pas été inquiétés.

Le rectorat, sollicité dans l’un des cas, confirme avoir été alerté, mais ne dispose “d’aucun élément laissant entendre qu’il s’agit de harcèlement”. 

Certains élèves évoquent néanmoins un climat délétère, des “conseils de discipline déguisés”, et des convocations sans motif officiel.

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Plusieurs témoignages dénoncent des propos discriminatoires. Une enseignante affirme que la responsable de la scolarité aurait qualifié un groupe d’élèves de “clan d’Arabes” lors d’un conseil de classe. 

Le directeur indique ne pas avoir eu connaissance de ces propos. D’autres membres de l’équipe pédagogique affirment avoir vu un drapeau du Rassemblement national dans le bureau d’un cadre de l’école.

Interrogé par Challenges, Emmanuel Ostian a rejeté les accusations de racisme : “Nous ne sommes pas de méchants racistes”, a-t-il déclaré. Il justifie les licenciements par des raisons économiques et pédagogiques : “Certains étudiants admis précédemment n’ont pas le niveau requis”.

Si la direction de l’école maintient que les décisions prises relèvent exclusivement de critères de compétence, de niveau et de gestion budgétaire, elle n’a pour l’instant pas réagi aux signalements internes concernant des comportements discriminatoires.

SOURCE:TRT Français
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