L'italie opère ces dernières années une percée spectaculaire en Algérie et en Tunisie, au détriment de la France. Rome a doublé le volume de ses exportations vers Alger en trois ans, atteignant 21 milliards de dollars. Le secteur des hydrocarbures est le moteur de cette embellie.
Le pays est devenu le premier fournisseur de gaz de l’Italie en remplacement de la Russie sous le coup des sanctions occidentales.
Des investissements majeurs comme le gazoduc Transmet consolident davantage le leadership et lui confèrent, aussi, la sécurité dans l’approvisionnement énergétique.
Au-delà de l'énergie, les deux pays ont signé il y a trois ans, 16 accords et protocoles dans des domaines aussi variés que l’industrie pharmaceutique, les start-up, l’agriculture, les infrastructures, l’artisanat, la coopération scientifique et policière notamment.
L'Italie pourrait aussi profiter de l’exclusion de fait de la France de la fourniture du blé à l'Algérie depuis juillet dernier.
“L’Algérie a exclu les entreprises françaises d’un appel d’offres pour l’importation de blé cette semaine et a exigé que les entreprises participantes ne proposent pas de blé d’origine française, ce qui semble être une retombée des tensions diplomatiques renouvelées entre Alger et Paris”, selon les informations l’agence Reuters, citant des sources commerciales.
Pourtant, en juin 2024, Alger avait commandé 800 000 tonnes de blé tendre, dans le cadre d’achats annuels de plus de 7,5 millions de tonnes, dont une grande partie provenait de l’Hexagone.
En 2023, le volume total des exportations agricoles et agroalimentaires de la France vers l’Algérie a été divisé par deux par rapport à 2022. En 2024, la chute des échanges s’est encore accentuée, selon le site d’informations algérien TSA.
De 1,3 milliard d’euros en 2022, les exportations agricoles de la France vers l’Algérie ont chuté de 50% en 2023, pour atteindre 628 millions d’euros.
Les tensions diplomatiques entre les dirigeants politiques algériens et français rejaillissent donc directement sur les échanges de produits agricoles.
Les liens entre Alger et Paris souffrent du contentieux historique, exacerbé ces derniers temps par la reconnaissance de la “marocanité” du Sahara occidental et des multiples déclarations des personnalités françaises et du “mauvais traitement” réservé aux citoyens algériens dans les aéroports en France.
Le Maroc comme bouée de sauvetage
En plus de l'Algérie, la Tunisie entretient aussi une relation en dents de scie avec la France et c’est l’Italie qui en profite.
Comme pour le cas de l'Algérie, la politique semble être la pomme de discorde. Le président tunisien Kaïs Saïed apprécie mal les critiques d'autoritarisme de certains dirigeants et de la presse française, alors que l’Italie semble monter en puissance.
L’Italie reste en effet le premier investisseur étranger dans le secteur énergétique tunisien et le deuxième à l’échelle nationale. Le montant d’investissements cumulés en 2024 s'élève à 3,7 milliards de dinars (un peu plus de un milliard et 200 millions de dollars) avec plus de 83 mille emplois créés, d'après Mohamed Ali Nafti, ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’Etranger. Près d’un millier d’entreprises italiennes sont implantées en Tunisie, “bénéficiant des avantages accordés aux investisseurs dans les secteurs stratégiques”.
Interrogé par l’Agence Anadolu, Umberto Profazio, analyste principal à l'Institut international d'études stratégiques (IISS) basé à Londres, souligne que l’attitude de la France a favorisé un triangle stratégique de coopération entre l'Italie, la Tunisie et l'Algérie. Ce qui diminue davantage l'influence française dans ses anciennes colonies du Maghreb.
Pour compenser sa perte d’influence en Tunisie et en Algérie, la France s'est tournée vers le Maroc en tant que partenaire stratégique, a observé Profazio.
“Le Maghreb se trouve aujourd’hui dans cette situation difficile, la France se plaçant ouvertement du côté du Maroc en reconnaissant sa souveraineté sur le Sahara occidental, ce qui aggrave les lignes de faille entre la France et l’Algérie “, a-t-il déclaré.
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