FRANCE
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Avion: appel à un cessez-le-feu à Gaza censuré, au nom de la neutralité ?
Le tribunal administratif a ordonné à la mairie d’Avion dans le Pas-de-Calais, de retirer de sa façade une banderole exigeant la fin des massacres à Gaza. Elle a été réinstallée à l’entrée de la ville.
Avion: appel à un cessez-le-feu à Gaza censuré, au nom de la neutralité ?
La banderole a été décrochée dimanche 17 Août avec la présence de nombreux élus locaux venus soutenir le maire d'Avion / TRT Global
il y a 15 heures

Une nouvelle mairie française est contrainte de retirer un signe de soutien au peuple palestinien. Après les drapeaux palestiniens déployés à Besançon, Saint-Denis, Gennevilliers, Mitry-Mory, c’est désormais la ville d’Avion (Pas-de-Calais) qui se voit rappelée à l’ordre par le tribunal administratif.

Le 10 août, le maire communiste d’Avion publie sur les réseaux sociaux une photo de la banderole, accrochée depuis près d’un mois. Alertée par le député du Rassemblement national de la circonscription, la préfecture a saisi le tribunal administratif au nom de la neutralité du service public.
Mais cette fois, il ne s’agissait ni d’un drapeau palestinien ni d’un drapeau israélien comme à Nice, mais d’un appel à la paix, un appel au cessez-le-feu. S’il y a un drapeau, c’est celui de la paix : une colombe sur fond de bandes multicolores, et non celui d’un État.

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Le principe de neutralité à géométrie variable

Après la décision du tribunal, la mairie a décidé de ne pas abdiquer et a déplacé la banderole à l’entrée de la ville, lundi soir. Le message “Cessez-le-feu immédiat. Pour le respect du droit international. Stop aux massacres à Gaza !” a été décroché et déplacé dimanche, devant 400 personnes. 

Dans une interview dans le journal l’Humanité, le maire Jean Létoquart rappelle l’engagement de sa commune pour la paix. “Nous l’avons fait pour l’Ukraine, par exemple. Je l’ai fait aussi, et nul ne peut l’ignorer, le 7 octobre 2023 lors de l’attaque (...) du Hamas. Ce qui est affiché ici n’est pas partial“.

Et Jean Létoquart de souligner que la Cour pénale internationale a tranché en émettant un mandat d’arrêt contre le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu.

Ce nouvel épisode illustre l’ambiance partiale qui règne en France. Chaque commune qui a fait montre d’un soutien pour Gaza s’est systématiquement vue sanctionnée par le tribunal administratif après la dénonciation d’élus de droite ou d’organisations sionistes. 

Par contre, Christian Estrosi, le maire de Nice, a pu afficher six drapeaux israéliens sur le fronton de sa mairie pendant plus d’une année, sans que le tribunal administratif ne trouve rien à dire, même après qu’une citoyenne ait porté plainte. Les juges n’ont réagi qu’en juin dernier, vingt mois après l’accrochage.

En tout cas, ce type d’affaire occupe les tribunaux administratifs depuis des mois, à tel point qu’une publication juridique “Le club des juristes” s’est posé la question dans leur publication début juillet : un maire peut-il, ou non, accrocher un drapeau sur sa mairie, autre que le drapeau français ou européen ? Pour ces juristes, la réponse est oui.

Un point de droit contesté par des juristes

Les juges se fondent sur un arrêt rendu en 2005 à propos du drapeau indépendantiste de la Martinique, accroché au fronton de la mairie de Sainte-Anne. 

Le Conseil d’État avait affirmé que le principe de neutralité des services publics s’oppose à ce que soient apposés des signes revendiquant des opinions politiques, religieuses ou philosophiques”. 

Pour ces juristes, l’évocation du principe de neutralité est insuffisante et floue car la justice a parfois statué en faveur de l’accrochage du drapeau ukrainien sur la mairie de Saint-Germain-en-Laye, fin 2024 au nom du soutien diplomatique de la France à un pays en guerre.
Selon eux, seuls deux principes constitutionnels devraient prévaloir : le principe de neutralité religieuse et l’indivisibilité de la République. À ce titre, on ne peut afficher ni un drapeau indépendantiste ni un message religieux. Ils concluent donc que rien n’empêche légalement une commune de pavoiser son fronton du drapeau palestinien ou israélien. 

“On voit mal ce qu’il peut y avoir d’illégal à dénoncer les crimes commis par le gouvernement israélien et à exprimer une solidarité avec la population massacrée à Gaza. En revanche, les propos qui font l’apologie du terrorisme ou de crimes contre l’humanité sont illégaux.”

Alors pourquoi les tribunaux administratifs se montrent-ils si sévères dès qu’un drapeau ou une banderole liés à la Palestine apparaît ? Les juges subissent-ils l’influence du soutien du gouvernement français à Israël ? Reprennent-ils l’amalgame entretenu par certaines voix pro-israéliennes entre drapeau palestinien et terrorisme ?

La question mérite d’être posée, tant ces décisions créent un sérieux doute quant à l’impartialité de la justice administrative.

SOURCE:TRT français et agences
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