FRANCE
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Retailleau, l’islamophobie et la xénophobie
Profitant des incidents survenus à Paris à la suite du triomphe du PSG en Ligue des champions, Bruno Retailleau a qualifié les casseurs de “barbares” et a évoqué une “sauvagerie”, dévoilant sa vision raciste de la France, selon les critiques.
Retailleau, l’islamophobie et la xénophobie
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau surfe sur les thématiques de l'extrême droite pour affermir son audience, Boulogne-Billancourt près de Paris, France. / Reuters
2 juin 2025

Après le raz de marée de 73,3 % qui l’a propulsé à la tête des Républicains le 18 mai dernier, devant Laurent Wauquiez, Bruno Retailleau, désormais ministre de l'Intérieur, semble profiter des incidents survenus à Paris pour affiner son ambition d’homme d’État.

Vers 23h38 (heure française), avant même la fin de la rencontre, le ministre français s’est précipité pour tweeter sur son compte X un message polémique, qui continue de susciter la controverse, non seulement au sein de la classe politique, mais aussi dans la société française.

“Les vrais supporters du PSG sont en train de s’enthousiasmer devant le magnifique match de leur équipe. Pendant ce temps-là, des barbares sont venus dans les rues de Paris pour commettre des délits et provoquer les forces de l’ordre”, écrit-il, avant de conclure : “Il est insupportable qu’il ne soit pas envisageable de faire la fête sans craindre la sauvagerie d’une minorité de voyous qui ne respectent rien”.

“Barbares”, “Sauvegerie”

“Barbares”, “sauvagerie” : Retailleau banalise l’usage de termes issus d’un registre naguère utilisé exclusivement par l'extrême droite française pour désigner une partie de ses concitoyens. Le dictionnaire définit le mot barbare comme “celui qui manifeste de la cruauté, qui est inhumain”, donc sauvage. “Par extension, le terme a servi à qualifier tous les étrangers à la civilisation grecque, puis à la civilisation romaine”. 

“Il a toujours le mot qu’il ne faut pas. Quand vous dites ‘les barbares’, [cela] veut dire qu’il y a des gens qui sont barbares et d’autres qui sont civilisés. Et dans les termes de Bruno Retailleau, la civilisation, c’est judéo-chrétien”, s’est indigné le député LFI Éric Coquerel sur Franceinfo.

“Il n'y a pas de citoyens de première et de citoyens de deuxième zone. Qualifier quelqu’un de barbare, étymologiquement, c’est le mettre hors de la communauté nationale”, s'insurge sur Sud Info Nicolas Corato, Président fondateur du think tank Place de La République. Pour lui, dans une société, “il y a des gentils et des méchants, des gens qui se comportent bien et des gens qui ne se comportent pas bien” et il appartient à la “République de sanctionner”.

Malgré le tollé provoqué par ses prises de positions controversées, le ministre français de l'Intérieur demeure constant et déterminé.

Islamophobie et xénophobie

Joignant les actes à la parole, Bruno Retailleau semble s’acharner sur certaines communautés, notamment la communauté musulmane et les femmes. Il leur dénie, par exemple, le droit de porter le voile.

Il a en effet provoqué un véritable tollé après avoir scandé “À bas le voile !” lors d’un meeting organisé en mars dernier par le collectif “Agir ensemble”, émanation du lobby pro-israélien ELNET.

“Le sport c’est cette grammaire universelle, où l’on peut communier quelles que soient les origines et quelles que soient les religions et les croyances. Et donc vive le sport, et à bas le voile bien sûr !”, a-t-il lancé depuis la tribune de l’évènement, auquel participait également l’ancien Premier Ministre Manuel Valls.

Une islamophobie rampante condamnée par le Collectif contre l’islamophobie en Europe, qui a saisi la Cour de justice de la République.

“Cette campagne permanente, délétère et stigmatisante, alimente les tensions et fragilise la cohésion nationale” et “expose ces femmes à des formes croissantes d’insécurité, d’agressions verbales comme physiques, devenues une réalité quotidienne pour un nombre grandissant de citoyennes que la République se doit pourtant de protéger”, écrivait l’instance musulmane.

Des critiques jusque dans son propre camp

L’utilisation du mot “barbare” a même suscité des critiques au sein du gouvernement. Le ministre de l'Industrie Marc Ferracci a déconseillé l’usage du mot "barbare", ”parce qu'il y a une connotation historique, une connotation culturelle. Il y a presque une connotation anthropologique à ce terme.” Il a ainsi déclaré : “Ce sont des délinquants. Je ne juge pas la sémantique des uns et des autres, moi j'utilise les mots que je souhaite utiliser. Le mot que j'utilise, c'est que ce sont des délinquants puisqu'ils commettent des délits." Le ministre de l'Industrie est partisan d’une réponse judiciaire et pénale ferme, tout en appelant à une réflexion collective sur les violences.

“Ce sont des délinquants. Je ne juge pas la sémantique des uns et des autres, moi j'utilise les mots que je souhaite utiliser. Le mot que j'utilise, c'est que ce sont des délinquants puisqu'ils commettent des délits."

Marc Ferracci, ministre de l’industrie

Les propos de Retailleau  au sujet des “barbares” et de la “sauvagerie” au-delà de l'islamophobie visent aussi les français issus de l’immigration. La violence en France est, d'après lui, alimentée par les banlieues, du fait de la présence massive des Français issus de l’immigration. C’est cette analyse qu’il avait déjà avancée pour expliquer  les émeutes ayant suivi la mort  du jeune Nahel, tué à bout portant par un policier, après un refus d'obtempérer présumé, à bord d’un véhicule en 2023.  

Pour autant, la cote de popularité de Retailleau ne cesse de croître, tout comme son ambition de représenter Les Républicains à la présidentielle de 2027. “Je serai le premier artisan de notre victoire, je l’espère bien, en 2027”, a-t-il déclaré peu après son élection à la tête des Républicains .

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SOURCE:TRT FRançais
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