Mercredi 18 juin, les députés européens ont débattu pour la première fois en 20 mois de la situation à Gaza. “Mettre fin au génocide à Gaza: il est temps pour l'UE de prendre des sanctions”, cette question d’actualité a été déposée par la gauche européenne.
Il est apparu durant les interventions des uns et des autres qu'une majorité de députés souhaitent une suspension de l’accord d'association avec Israël, souhaitent des pressions plus importantes ainsi qu’un embargo sur la vente d’armes, mis à part l’extrême-droite et quelques élus de droite qui nient toujours le génocide et blâment le Hamas pour les 56 000 victimes gazaouis.
Ce débat a été marqué par l’émotion à de nombreuses reprises. Nombreux intervenants étaient très émus, à l’instar de l’Italien Mimmo Lucano qui a demandé: “pourquoi sommes-nous complices ? Tous les principes humanitaires ont été bafoués et les portes de l’Union européenne restent ouvertes.”
Plusieurs députés ont dénoncé le double discours de la diplomatie européenne, comme le grec Nikos Pappas qui demande pourquoi l’UE est “sourde et aveugle”.
La vice-présidente de la Commission européenne et commissaire chargée des Affaires étrangères, Kaja Kallas, a été très critiquée par les députés pour son silence sur la question de Gaza. Elle a nié et surtout conclu que la suspension de l’accord avec Israël avait peu de chance d’être actée car elle requiert l’unanimité des chefs d’Etat et cette unanimité n’existe pas au sein des 27 pays membres de l’Union européenne. L’Allemagne a déjà fait savoir qu’elle ne soutenait pas la suspension de l’accord.
L’accord d’association avec Israël toujours en cours
Le 20 mai dernier, une majorité de ministres européens des Affaires étrangères avaient demandé le réexamen de cet accord à la lumière des crimes de guerre perpétrés à Gaza. La commissaire Kallas supervise cette enquête.
Marc Botenga, député européen belge du PTB (parti des travailleurs belges) milite depuis des mois pour la suspension de cet accord. Il n’hésite pas à tacler la commissaire Kaja Kallas auprès de TRT Français.
“Ce qu’elle dit est faux, il y a des éléments de l’accord d’association qui peuvent être stoppés sans avoir l’unanimité des votes des pays européens, la partie commerciale de l’accord, ce qui concerne aussi l’éducation. Il y a donc moyen d’avancer si on le veut vraiment. Quand on ne veut pas, on trouve des excuses. Quand on veut, on trouve un chemin.”
L’élu, comme son groupe de gauche, souhaite la suspension de cet accord qui dans son article 2 impose un respect des droits de l’homme pour être maintenu. “Si l’Union européenne continue de financer, continue d’armer, continue son partenariat privilégié, elle viole ses engagements internationaux. L’UE a toujours parlé de droits humains et de droit international. De plus, Israël ne respecte pas l’accord signé avec l’Union européenne notamment en matière de droits humains. Si lundi 23 juin, l’UE n’arrive pas à dire “on suspend cet accord”, on va perdre le peu de crédibilité qu’on a encore.”
Le 23 juin, en effet, les ministres européens des Affaires étrangères se réuniront à Bruxelles, la situation au Moyen-Orient sera à l’ordre du jour et de nombreux députés attendent une décision sur cet accord d’association avec Israël.
Certains députés demandent un embargo militaire
Lors du débat au parlement européen, certains députés ont appelé à un embargo sur les armes. L’Allemagne, l’Italie, la France et l’Espagne vendent des armes à Israël mais Marc Botenga souhaiterait plutôt un embargo militaire, car l’UE achète des armes à Israël, et elle coopère avec Israël sur des questions de recherche et développement dans le domaine militaire.
La vente d’armes est de la compétence des Etats seuls, c’est un fait mais depuis 2008, une décision du Conseil européen (l’ensemble des chefs d’Etat des pays membres) stipule qu’en cas de violation du droit humanitaire, il faut suspendre les livraisons d’armes. “C’est un engagement que les Etats eux-mêmes ont pris, donc il faut être cohérent. Ou alors ils disent que le soutien à Israël est inconditionnel,” souligne l’élu belge.
Pour le député, les mobilisations qui se multiplient en Europe ont fait bouger les lignes et certains députés ont changé de discours, aime-t-il à souligner.
Ainsi, les organisateurs de la Grande marche vers Gaza organisent un rassemblement mondial à Bruxelles à partir de ce week-end. Une grande manifestation est prévue lundi 23 juin au moment où les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne se rassembleront, un mois après avoir demandé l’examen de l’accord d’association avec Israël.