AFRIQUE
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Le Mali veut rétablir sa souveraineté sur l’exploitation minière
La volonté affichée du Mali de rétablir sa souveraineté sur l’exploitation de son sous-sol se heurte souvent aux intérêts des multinationales comme la canadienne Barrick Mining.
Le Mali veut rétablir sa souveraineté sur l’exploitation minière
Des travailleurs de Barrick mining sur un site d'exploitation minier. / others
19 juin 2025

Depuis lundi, le Mali contrôle entièrement la plus grande mine d’or du pays, située sur le site de Loulo-Gounkoto, dans l'ouest du pays, un des plus importants gisements aurifères au monde.

Cette décision du tribunal de commerce de Bamako plaçant cette mine d’or sous administration provisoire pour six mois afin de “protéger les intérêts nationaux”, marque une étape supplémentaire dans la bataille que se livrent Barrick Mining (80%) et l’Etat du Mali (20%) pour le contrôle de cette mine d’or.

Alors que les deux partenaires sont devant les tribunaux et que la mine est aux arrêts depuis janvier, le Mali a réclamé cette mesure pour relancer les activités d'extractions d’or.

Dans cette perspective, Zoumana Makadji a été nommé administrateur provisoire, avec pour objectif majeur "d'ouvrir la mine dans les plus brefs délais". Le Mali dit ainsi "protéger les intérêts économiques nationaux" et évite "la fermeture brutale de la mine en l'absence d'un accord révisé".

Aux sources de la tension

La pomme de discorde entre le Mali et Barrick Mining est liée à la mésentente sur la répartition des revenus générés par l’exploitation de l’or. Bamako estime qu’il ne tire pas suffisamment parti des richesses de son sous-sol.

La crise entre le gouvernement malien et le groupe minier canadien Barrick Gold a pris une autre dimension le 14 janvier 2025, avec la cessation temporaire des activités à la mine d’or de Loulo-Gounkoto dans l’ouest du Mali, à la frontière avec le Sénégal.

Le 28 janvier dernier, suite à une décision de saisie conservatoire de la justice, les autorités maliennes se sont emparées d’au moins trois tonnes d’or d’une valeur approximative de 240 millions d’euros, représentant une partie de la production aurifère de Barrick Gold, d'après les informations de l’AFP.

En RelationOrpaillage au Sahel: exploitation informelle et manque à gagner

Les relations entre le gouvernement de transition, au pouvoir au Mali depuis 2022, et Barrick Gold se sont brusquement détériorées en octobre 2024, du fait des réticences du groupe minier canadien à appliquer les réformes adoptées par Bamako.

En Août 2023, le Mali a adopté un nouveau code minier avec l’objectif de faire profiter effectivement le pays des ressources de son sous-sol.

Un audit réalisé en 2022 à la demande des autorités a révélé que le pays perdait par an entre 500 millions et un milliard de dollars, dans cette exploitation minière qui profitait surtout aux compagnies occidentales.

D'où l'adoption d’un nouveau code minier. Il fixe à 30% la part maximale de l’État dans les mines, introduit une participation de 5% pour les investisseurs locaux et oblige les entreprises minières à verser leurs bénéfices sur des comptes bancaires au Mali.

Réforme minière ambitieuse

Avec cette réforme, le gouvernement malien attend chaque année des revenus d’au moins 762 millions d’euros issus des mines. Les exonérations fiscales qui faisaient perdre à l'État chaque année 91 millions d’euros ont également été supprimées.

Le Mali s'aligne ainsi avec le Burkina Faso et le Niger, les autres membres de l’AES (Alliance des Etats du Sahel), sur une perspective souverainiste de l'économie.

Du reste, en visite au Niger le 24 mars 2024 en présence de ses homologues nigériens et burkinabé, le Pr Amadou Keita, ministre malien des mines, avait précisé sa pensée.

“(…) nous avons dit que nos ressources désormais, ne vont plus servir à enrichir d’autres peuples mais bien au contraire, nos ressources minérales vont servir au développement de nos Etats”.

Pr Amadou Keita, ministre malien des mines

“Nous sommes trois pays ( Alliance des Etats du Sahel, ndlr) qui regorgent des ressources minérales et aujourd’hui, nous sommes dans une dynamique souverainiste”, avait précisé le Pr Amadou Keita rapporte sahel.org, le site d’informations du quotidien gouvernemental nigerien Le Sahel. “ C’est pourquoi, poursuivait-il, nous avons dit que nos ressources désormais, ne vont plus servir à enrichir d’autres peuples mais bien au contraire, nos ressources minérales vont servir au développement de nos Etats”.

Pays sans littoral, le Mali n’a pas d'hydrocarbures pour le moment. Il mise essentiellement sur son secteur minier pour engranger des devises. En 2022, il a produit un peu plus de 72 tonnes d’or, soit 10% du PIB, 25% du budget et 75% de ses exportations. Le sous-sol malien recèle aussi du lithium et du fer, alors que les recherches pétrolières sont prometteuses.

Reste à savoir si ce volontarisme des autorités maliennes dissuadera d'éventuels investisseurs dans les mines ou impulsera le développement d’un pays qui a cruellement besoin de ressources.

Lire aussi: Le Mali suspend l'exploitation artisanale de l'or pendant la saison des pluies




SOURCE:TRT Français
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